La Chouape : une bière qui pousse dans le nord

10.06.2021
«Faire pousser de la bière.» Voilà une idée originale qui fait sans doute rêver de nombreux fervents de produits brassicoles. Ce rêve, Louis Hébert l’a réalisé en cultivant des céréales biologiques, matière première nécessaire au brassage de sa bière, produite à quelques pas de ses champs. À Saint-Félicien, la microbrasserie La Chouape est portée par une histoire longue de 140 ans, à consommer sans modération.

Le nom Louis Hébert vous dit quelque chose? C’est qu’il a marqué un pan de l’histoire du Québec, mais aussi de l’histoire brassicole de la province. À l’époque de la Nouvelle-France, un certain Louis Hébert et sa femme, Marie Rollet, débarquaient, devenant ainsi les premiers colons. Il avait des semences d’orge et de houblon et elle, le savoir-faire brassicole. Marie Rollet est d’ailleurs considérée comme la première brasseuse de bière du Québec. Bien que les histoires des deux Louis Hébert ne soient pas intimement liées, on peut penser que le premier a influencé l’épopée houblonnée du Louis Hébert d’aujourd’hui…
En fait, c’est en 1881 que la véritable histoire des Hébert de Saint-Félicien commence. À l’origine, leur ferme située dans le rang Double, non loin du grandiose Piékouagami (aujourd’hui appelé lac Saint-Jean) et de la rivière Ashuapmushuan, en était une de subsistance, comme bien d’autres à l’époque. Elle fut transformée en ferme laitière, puis céréalière.

Cent quarante ans plus tard, La Chouape est toujours la seule ferme brassicole de la région et la seule du genre au Québec sous régie biologique. Louis Hébert, épaulé par sa conjointe, Marie-Ève Séguin, y cultive de l’orge, du sarrasin, du blé, de l’avoine et du houblon, matières premières d’une bière qui puise ses saveurs à même le sol du territoire nordique. «La portion agriculture apporte beaucoup de complexité à l’entreprise, mais c’est une valeur ajoutée au produit, croit l’agriculteur-brasseur. On peut déguster une part du terroir et du climat dans nos bières. Une touche qui permet à nos produits de se différencier.»

Ancien conseiller en développement durable, Louis Hébert a le terroir et l’environnement à cœur, valeur qu’il partage avec sa conjointe. Et ça se reflète dans l’ensemble des sphères de leur entreprise. L’approvisionnement de proximité est une priorité dans la sélection des ingrédients de base et des aromates qui entrent dans la fabrication des bières de La Chouape. Ceux-ci sont majoritairement bios et sont transformés à échelle humaine.

«On veut rester près des gens, de nos fournisseurs et de notre équipe. On veut continuer de s’impliquer dans notre milieu et garder le côté artisanal dans notre production», assure Louis Hébert.

À La Chouape, pas question que l’équipe de brassage devienne des opérateurs qui appuient sur les boutons d’un «gros kit» de brassage. Cette tâche s’effectue fourquet à la main pour récolter le moût. Ce mélange de céréales sera ensuite agrémenté de houblons et parfumé d’une panoplie de saveurs locales, afin de donner du caractère à chaque brassin. C’est à cette étape que la créativité opère, ce qui a mené à la création d’une centaine de recettes : de la blonde tranquille à la quadruple extraforte, en passant par la bière de saison qui met en valeur les petits fruits boréaux du verger d’à côté.

La fermentation des produits qui prendront la route des nombreux points de vente de la micro s’effectue dans la majorité des cas sur lie, en bouteille, pour concéder une effervescence naturelle et une signature unique à la bière. Une fois sur les tablettes, ces bouteilles qui arborent les dessins d’artistes de la région ont tout pour attirer l’œil des amateurs de broue.
La meilleure façon de «cueillir sa bière» est de visiter la ferme des Hébert, où on peut en apprendre plus sur La Chouape et profiter en toute simplicité du lieu bucolique bien ancré dans le terroir boréal. Le plaisir se décuple au pub du boulevard Sacré-Cœur, véritable moteur culturel de Saint-Félicien qui compte sur la plus belle terrasse en ville.
Santé!

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